Étiquetage des aliments
L’habit ne fait pas le moine
Par un arrêt du 4 juin 2015, la Cour de justice de l’Union européenne a rappelé que l’étiquetage ne doit pas induire le consommateur en erreur sur les ingrédients d’une denrée alimentaire.
L’étiquetage des aliments ne doit pas avoir pour effet d’induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques du produit. Cela semble une évidence. Il aura pourtant fallu qu’un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 4 juin dernier rappelle ce principe de base aux industriels. À l’origine de cette affaire, une société allemande, Teekanne, qui commercialisait une infusion aux fruits (« Félix aventure framboise-vanille ») et faisait figurer sur l’emballage des images de framboise et de vanille assorties de mentions telles que « infusion aux fruits avec des arômes naturels », « ne contient que des ingrédients naturels » ainsi que « goût framboise-vanille ».
L’ennui est que, si les « arômes » mis en exergue étaient bien « naturels », ils n’étaient pas issus de vraies framboises ni de vraies gousses de vanille, contrairement à ce que suggéraient les illustrations. Le seul moyen pour le consommateur de faire la différence était de lire attentivement la liste des ingrédients écrits en petits caractères sur l’un des côtés de l’emballage. Ce qui, selon la Cour, n’est pas suffisant. Car « s’il est vrai que le consommateur est supposé lire la liste d’ingrédients avant d’acheter un produit, elle ne permet pas, même si elle est exacte, de corriger l’impression erronée ou équivoque de l’emballage », ont conclu les juges.
À l’heure où les arômes de synthèse envahissent les denrées alimentaires, l’arrêt de la Cour de justice européenne remet les pendules à l’heure et devrait inciter les fabricants à faire preuve de plus de prudence. Car des cas similaires à celui de Teekanne, les linéaires des grandes surfaces en regorgent. Des yaourts aux boissons aromatisées, en passant par les glaces et les confiseries, les représentations d’ingrédients ne figurant pas dans les recettes sont légion. Plus grave, certaines mentions, pour le moins ambiguës, sont parfaitement légales. À commencer par la dénomination « arôme naturel », qui signifie simplement que celui-ci a été élaboré à partir de matières premières naturelles : pulpe de betterave, son de blé ou de riz, copeaux de bois… On obtient, par exemple, des molécules de vanilline en faisant fermenter de la lignine, un sous-produit de la pâte à papier. C’est tout bénéfice pour l’industriel qui paie cette vanilline deux fois moins cher qu’un arôme de vanille extrait du fruit du vanillier. Ni vu ni connu. Car quels consommateurs font la différence entre les mentions « arôme naturel » (issu de biotechnologies) et « arôme naturel de vanille » (issu de la gousse de vanille) sur une étiquette ?
En réalité, seul le mot « naturel » polarise l’attention des consommateurs qui veulent des produits « sains » contenant le moins d’additifs possible. Les industriels de l’agroalimentaire surfent sur la tendance et ne manquent jamais d’en faire un argument de vente sur les emballages. « L’affichage des mentions « arôme naturel » ou » sans arôme artificiel » sur la face avant crée un effet « halo » qui masque les ingrédients douteux » remarque Béatrice de Reynal, nutritionniste et directrice de la société de conseil Nutrimarketing. « De nombreuses denrées alimentaires comportent effectivement des arômes naturels, mais sont, par ailleurs, bourrés de conservateurs, colorants, agents de texture, stabilisants, et autres additifs en tous genres ».