Nouveaux médicaments contre le cancer des prix « injustes et exorbitants »
Les nouveaux traitements contre le cancer coûtent de plus en plus cher. Ils coûtent si cher que l’assurance maladie s’interroge sur sa capacité à les financer. Or, ce n’est pas une fatalité. En effet, le prix de ces médicaments n’est pas justifié. Ils sont facturés certainement beaucoup plus chers que ce qu’ils coûtent vraiment. La Ligue contre le cancer exigeait donc, mercredi 16 décembre, une « régulation immédiate ».
Avez-vous idée du prix des nouveaux médicaments contre le cancer ? Ils sont faramineux. Ils représentent des dépenses de l’ordre de 40 000, 50 000 à 75 000 euros par an et par patient. Par comparaison, les chimiothérapies, médicaments anticancéreux classiques, ne coûtent qu’environ 1 000 euros par patient. Le Keytruda (pembrolizumab), l’une des plus récentes molécules, pourrait être facturé plus de 100 000 euros par an pour chaque malade traité, pour un mélanome, selon la Ligue contre le cancer. L’association lançait donc, il y a quelques jours, l’alerte sur les prix « injustes,exorbitants et insupportables pour notre système de santé » des nouveaux médicaments contre le cancer.
« La vie n’a pas de prix »
Une sorte de fatalisme a prévalu longtemps, face aux sommes extrêmement élevées demandées par l’industrie pharmaceutique. L’idée que « la vie n’a pas de prix » justifiait inconsciemment les dépenses pour ces traitements. Il y a une sorte de malaise à discuter d’argent quand des existences humaines sont en jeu. Mais dans un contexte de ressources limitées, il est au contraire éthique de se poser la question du prix à payer pour ces médicaments. Si leur coût est tel qu’il compromet l’accès de certains malades à ces traitements, la question cruciale se pose : pourquoi sont-ils si chers ?
Déconnecté du coût réel
On pourrait croire que ces médicaments dits « innovants » coûtent très chers à trouver et à produire. Mais ce n’est pas le cas. Les coûts de fabrication ne sont évidemment pas nuls mais ils se comptent en centaines d’euros, pas en milliers. Ensuite, il faut estimer les coûts de recherche et développement du médicament. Il est difficile d’en faire une estimation indépendante précise. Mais il est certain que le prix demandé est très supérieur à ce coût, même additionné d’une marge confortable. Signe de cette déconnexion : le prix de certains médicaments continue d’augmenter avec le temps, alors qu’une fois amortis les investissements initiaux, leur prix devrait s’infléchir. Une centaine d’oncologues américains ont ainsi lancé une pétition, courant 2015, pour exiger une « baisse des prix » des anticancéreux (1). Dans cette lignée, mais moins explicite, la Ligue contre le cancer en France vient de demander une « régulation immédiate ».
Nouveaux mais pas toujours innovants
Le Leem, qui représente les entreprises du médicament en France, a répondu le jour même à la Ligue, se disant prêt à ouvrir le débat. Dans son communiqué, le représentant des laboratoires pharmaceutiques insiste sur le caractère « innovant » de ses produits : « des innovations qui ouvrent à des personnes […] de nouvelles perspectives de guérison ou de rémission ». Or, les nouveaux anticancéreux, si chers, sont loin de tous répondre à cet espoir. Dans certains cas, comme le Glivec (imatinib) contre certaines leucémies, les nouvelles molécules sauvent littéralement la vie de patients. Mais dans beaucoup de cas, malheureusement, les nouveaux traitements n’apportent qu’un bénéfice marginal : quelques mois voire quelques semaines de survie supplémentaires, grevés d’effets indésirables lourds. Ces médicaments sont nouveaux mais n’apportent pas grand-chose de neuf aux malades. Leur prix faramineux n’en est que plus choquant.