Loi sur le médicament
Le vaste débat lancé en 2011 en France sur le médicament, au décours des révélations sur le désastre Mediator°, a laissé espérer de nombreux changements. Mais la loi finalement votée, malgré certaines avancées, s’avère en net retrait par rapport à diverses recommandations officielles, et ne vise pas assez l’intérêt premier des patients.
Le désastre Mediator° a été l’occasion d’un vaste débat en France en 2011 sur le médicament. Les missions de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), du Sénat, de l’Assemblée nationale, la mission auprès du président de la République, les Assises du médicament, etc., ont montré que la France était en attente de changements très importants dans les règles et les pratiques relatives au médicament. Et que l’Europe a grand besoin aussi du même vaste changement.
Le projet de loi du gouvernement n’a retenu qu’une faible part des recommandations faites par les différentes instances citées plus haut, et s’est concentré quasi exclusivement sur l’agence du médicament et ses relations avec les firmes. Une partie de la loi se borne à faire remonter au niveau législatif des règles déjà inscrites au niveau réglementaire ou à transposer des mesures issues de la directive européenne sur la pharmacovigilance.
On y trouve quelques avancées en termes de transparence et de gestion des liens d’intérêts, de transparence des processus d’expertise et de décision, d’encadrement des dispositifs médicaux et d’études post- autorisation de mise sur le marché (AMM). Mais pratiquement pas d’avancée sur la comparaison des médicaments avec les traitements de référence notamment avant AMM, rien sur le financement public d’une recherche clinique permettant un fort développement d’une expertise indépendante, rien sur la formation des soignants en pharmacovigilance et en pharmacologie clinique, etc.
En seconde lecture au Parlement, les députés ont beaucoup affaibli le texte voté par les sénateurs et notamment supprimé les mesures qui auraient mieux permis aux victimes de médicaments d’être reconnues et prises en charge : présomption de responsabilité, actions de groupe. Le texte voté par les députés en seconde lecture est en recul même par rapport au texte qu’ils avaient voté en première lecture. C’est le cas par exemple de l’article prévoyant une comparaison des médicaments pour pouvoir être remboursés, qui est devenu très flou.
Avec des milliers de morts dus aux médicaments chaque année, et bien plus encore de victimes d’effets indésirables graves, avec une consommation de médicaments parmi les plus élevées du monde, la France a bien un problème avec le médicament, très largement au-delà du désastre Mediator°. Ce problème ne sera pas résolu par la nouvelle loi française sur le médicament.
Il reste beaucoup à faire. Les débats ouverts en 2011 en France sur le médicament montrent que d’autres avancées nécessaires sont à portée de main, en mettant au cœur des préoccupations la recherche de progrès et de protection pour les patients.
En pratique, beaucoup dépendra de la détermination de l’agence du médicament et de son encadrement à tenir le cap à long terme. Beaucoup tiendra aussi au comportement des soignants et des patients face aux médicaments. Pour tous, Prescrire poursuivra son action d’information et de formation indépendante de référence, au service avant tout de l’intérêt des patients.