Energie Environnement

La ouate de cellulose, l’isolant écolo… qui craint l’eau

Pour avoir voulu isoler leur habitation avec un matériau écologique, des dizaines de consommateurs se retrouvent avec d’insupportables odeurs. La faute à un incroyable raté des professionnels et des pouvoirs publics.

Début octobre, une odeur « insoutenable » d’ammoniac se répand dans la maison de la famille Tétard, installée à Bressuire (Deux-Sèvres). « Nous étions obligés de laisser les fenêtres ouvertes en permanence », racontent Murielle et Yann.
Les pompiers interviennent deux fois sans savoir d’où vient l’odeur nauséabonde. La coupable finit par être découverte : c’est la ouate de cellulose posée dix jours plus tôt pour isoler la maison. L’installateur n’a d’autre choix que de retirer l’isolant écolo (élaboré à partir de journaux recyclés) et de le remplacer par de la laine minérale.

Les premières pluies d’automne sont fatales

Une centaine d’autres foyers ont subi les mêmes désagréments. En cause, la présence de sulfate d’ammonium qui, en conditions humides, peut dégager de l’ammoniac. Or, la majorité des cas ont été signalés lors du premier épisode pluvieux de l’automne.

Les sels d’ammonium n’ont été que très récemment introduits dans la ouate comme retardateurs de flamme, en remplacement des sels de bore. Fin 2011, les pouvoirs publics décident qu’il faut faire disparaître au plus vite ces derniers, reprotoxiques avérés, des produits de construction. Composée de représentants des ministères et de professionnels, la CCFAT – commission chargée de formuler des avis techniques sur les matériaux utilisés dans le bâtiment – s’appuie sur la directive européenne 98/8/CE qui interdit les sels de bore dans les biocides.

Les fabricants contestent en vain

Les fabricants, qui emploient depuis trente ans les sels de bore dans leurs matériaux, contestent cette décision. Ils estiment en effet que ces produits ne sont pas utilisés en tant que biocides dans la ouate, mais en tant qu’ignifugeants. En vain : la CCFAT n’est pas convaincue. « Il était un peu paradoxal qu’un produit présenté comme “vert” contienne un additif considéré comme dangereux pour la santé humaine », explique aujourd’hui Georges Debiesse, son président.

Les fabricants ont alors un an pour modifier la composition de leur ouate. Un délai très court, selon Olivier Legrand, président du Syndicat des producteurs de ouate de cellulose. « Les tests réalisés avec la nouvelle formulation dans les laboratoires n’ont pas permis de détecter d’anomalie, explique-t-il. Les problèmes sont apparus sur le terrain. » Pourtant, le Centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), organe semi-public, avait lui-même réalisé des tests et validé le procédé.

Les pouvoirs publics contraints de faire machine arrière

Le 30 septembre 2012, la décision entre en application : les industriels sont contraints de retirer leurs produits contenant des sels de bore. Mais le 6 novembre, alors que les plaintes de consommateurs s’accumulent, les pouvoirs publics font machine arrière et revalident les anciens produits.

La CCFAT reconnaît aujourd’hui que la réglementation européenne Reach autorise bien la présence de sels de bore jusqu’à une concentration de 5,5 %. Or, la teneur dans les ouates de cellulose est inférieure à ce seuil. Mais Georges Debiesse argue que ce texte, publié en février 2012, n’est applicable que depuis juin 2012 ; alors que la décision de retrait des sels de bore a été prise fin 2011.

La CCFAT continue à souhaiter que « la ouate de cellulose puisse, dans les meilleurs délais, se passer des sels de bore sans pour autant exposer nos concitoyens aux désagréments des odeurs d’ammoniac ».

60 millions de consommateurs 

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