26 janvier 2012
La Cour des comptes dénonce le coût prohibitif de la politique publique d’aide aux agrocarburants. Un coût de près de 3 milliards d’euros, répercuté sur la facture de carburant et supporté entièrement par les automobilistes.
« L’automobiliste sait-il que ses factures de carburant financent, sans qu’on le sache et pour des montants considérables, la totalité de la politique française en faveur des biocarburants ? », questionne Didier Migaud, le président de la Cour des comptes, en présentant le rapport de la haute juridiction financière sur « l’évaluation de la politique d’aide aux biocarburants ». D’entrée, le ton est donné, l’action de l’État en faveur des agrocarburants n’a pas la faveur de la Cour des comptes. En cause, ses incohérences et son coût faramineux supporté par les consommateurs.
Les obligations d’incorporation de biocarburants fixées par le gouvernement, soit 7,6 % pour le gazole et 10,3 % pour l’essence en 2010, c’est « irréaliste », assène la Cour des comptes, preuve à l’appui. En effet, ces taux sont incompatibles avec les normes de qualité des carburants ! Du coup, cet objectif n’est pas atteint et l’État peut sanctionner les distributeurs de carburant pour non respect des taux d’incorporation. Ils versent plus de 100 millions de taxe par an… qu’ils répercutent dans les prix à la pompe, à la charge de l’usager !
Et comme les biocarburants ont une densité énergétique inférieure à celle des carburants fossiles, ils provoquent une surconsommation. L’automobiliste, qui fait le plein plus souvent, est taxé d’autant plus.
3 milliards d’euros versés par les automobilistes
Quant à l’exonération de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), c’est une belle subvention accordée à la filière. Elle a même créé une rente de situation dans le secteur du biodiesel. Au final, a calculé la Cour, de 2005 à 2010, cette politique de soutien a coûté 3 milliards d’euros, entièrement versés par les automobilistes contribuables. Sans le savoir, les consommateurs ont financé la filière industrielle et ses usines, sans qu’on ne leur ait jamais demandé s’ils étaient favorables aux agrocarburants.
Conclusion de la Cour, les biocarburants, en tant qu‘élément de la politique agricole, sont favorables aux grandes cultures. En revanche, leur bilan énergétique n’est pas aussi favorable qu’annoncé et leur pertinence environnementale est « de plus en plus contestée ».
Voilà de fait des années que ce bilan énergétique et environnemental des agrocarburants est revu à la baisse, au point d’apparaître négatif dès qu’on prend en compte le changement d’affectation des sols. Que Choisir s’en est souvent fait l’écho. La Cour des comptes démontre qu’en plus, ce sont les consommateurs qui financent cette filière industrielle. À quand la fin de ces prélèvements indus sur les automobilistes ?
Élisabeth Chesnais