S’inspirant de modèles développés outre-Atlantique, la société Prêt d’Union lance la première plateforme en ligne de prêts entre particuliers. Une initiative séduisante, mais au mécanisme plus compliqué qu’il n’y paraît.
Ouvert au grand public depuis le 14 octobre, Pretdunion.fr est né d’un mouvement de colère. Celui de Charles Egly, président du directoire et co-fondateur de Prêt d’Union, avec Thomas Beylot. Cet ancien banquier n’a guère apprécié que son propre employeur le coince, il y a quelques années, avec un crédit revolving à 14 % alors qu’il avait simplement besoin d’un prêt personnel amortissable pour payer un surplus d’impôts. « Cette mauvaise expérience a été l’occasion pour moi de découvrir l’univers du crédit à la consommation, ses pièges et surtout les distorsions de conditions de prêt qui pouvaient exister selon les établissements », témoigne Charles Egly.
Le but de Prêt d’Union est justement de rompre avec cette logique. « Nous voulons réduire l’intermédiation entre prêteurs et emprunteurs afin que chacun y trouve son compte », explique Thomas Beylot. Contrairement à ce qu’une présentation trop rapide pourrait laisser à penser, Prêt d’Union n’est pas un énième courtier en ligne qui négocierait auprès des banques les meilleures conditions de taux pour ses clients. Chez Prêt d’Union, le prêteur est un particulier. Une personne qui a un surplus d’épargne qu’elle souhaite rémunérer, tout en soutenant par la même occasion la demande de prêt d’un autre particulier. « Notre démarche s’inscrit dans une tradition financière solidaire et mutualiste, car l’argent recueilli sert exclusivement à financer des ménages », glisse Charles Egly. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si la jeune start-up est parvenue à convaincre le Crédit mutuel Arkéa de contribuer à hauteur de 3,8 millions à sa levée de fonds.
Frais de dossier
Prêt d’Union fait donc l’interface entre, d’un côté, l’emprunteur, et de l’autre, le prêteur.
Le premier a accès à une palette de trois crédits personnels amortissables qui lui permettent d’emprunter entre 3 000 € et 19 500 €, sur une durée de 36, 48 ou 60 mois, moyennant des taux (TAEG) respectifs de 5,85 %, 6,79 % et 7,40 %. Soit de 1 à 1,5 point de moins que ce que l’on trouve en moyenne sur le marché. Une fraction de ces taux est composée de frais de dossier sur lesquels se rémunère la société Prêt d’Union. Pour un prêt de 5 000 € sur 36 mois, les frais de dossier sont par exemple de 2 %.
En face, le prêteur, ou plutôt l’investisseur, se voit proposer en contrepartie de la somme qu’il confie à Prêt d’Union un rendement annuel de 5,85 % sur 36 mois, de 6,79 % sur 48 mois et de 7,40 % sur 60 mois. Soit, là aussi, une rémunération bien supérieure à celle qu’affichent la plupart des placements bancaires sur des échéances similaires.
Le prêteur doit cependant bien comprendre d’où provient ce rendement. Lorsqu’il investit sur la plateforme, la somme qu’il dépose transite sur un compte (ouvert auprès du Crédit mutuel Arkéa) avant d’être placée dans un fonds commun obligataire Prêt d’Union, géré par EuroTitrisation, une société de gestion indépendante qui exerce en France depuis 1989.
Prélèvements sociaux
Le prêteur souscrit donc de fait un titre obligataire, lui-même contrepartie des prêts effectués, qui génère un rendement équivalant à ces prêts. Ce revenu, comme celui de toute obligation, est soumis aux prélèvements sociaux (13,5 %) et au prélèvement forfaitaire annuel de 19 %. Quant au capital, il est garanti par l’échéance du prêt.
Ce montage, vérifié et agréé par la Banque de France, repose donc avant tout sur la solvabilité des prêteurs. « Les dossiers sont rigoureusement sélectionnés à partir d’un scoring d’une quarantaine de questions extrêmement précises qui permettent d’estimer la solidité du prêteur. Une fois passé ce premier barrage, il doit fournir nombre de pièces justificatives (salaires, relevés de compte, etc.), lesquelles passent entre les mains d’une personne parfaitement rodée à la détection des fausses informations », précise Thomas Beylot. L’avenir dira si ce modèle de prêts peer to peer (P2P) tiendra ses promesses.
Et qu’ils proviennent d’un établissement financier « classique » ou d’une plateforme qui met en contact prêteurs et emprunteur, les crédits à la consommation doivent être contractés avec prudence pour ne pas se retrouver dans une situation de surendettement inextricable.
Laurence Delain-David