L’Europe, le lobbying sur le chauffage électrique
Il échappe à l’étiquette énergie
Alors que les chaudières et les pompes à chaleur vont devoir porter une étiquette énergie dès l’automne, le chauffage électrique échappe à toute obligation. Une anomalie scandaleuse qui mérite explication.
C’est l’histoire d’une intense opération de lobbying très réussie. Tous les appareils et les équipements destinés au grand public passent à l’étiquette énergie (sèche-linge, aspirateurs, hottes de cuisine mais aussi pneus…) les uns après les autres, et ce en dépit de la résistance des filières professionnelles concernées. Tous sauf un, le chauffage électrique.
Alors que les chaudières et les pompes à chaleur vont devoir afficher leur consommation et leur classe énergétique, tous les radiateurs électriques en sont exemptés. Motif avancé par la Commission européenne : le chauffage électrique est un chauffage d’appoint ! Interdit de rire. Les 30 % de ménages français qui se chauffent au tout électrique apprécieront.
La réalité est tout autre. Le projet initial de la Commission de Bruxelles incluait bien le chauffage électrique. Qu’il s’agisse de convecteurs, de panneaux radiants, de chaleur douce ou d’accumulation, tous les radiateurs devaient être classés en rouge et étiquetés F ou G, tant ce mode de chauffage consomme en énergie primaire (3 kWh nécessaires en production pour délivrer 1 kWh au consommateur). Appuyés par la puissance de lobbying de la filière électronucléaire française, les fabricants ont contesté, et gagné. Guère concernés puisque le chauffage électrique est une spécificité franco-française, les autres États membres ont laissé faire.
Mais le Royaume-Uni, de façon inattendue puisque le vote a eu lieu, vient de contester publiquement ce traitement de faveur réservé au chauffage électrique dans un courriel adressé aux autorités européennes. « La distorsion de concurrence est manifeste, c’est sans doute ce qui a poussé le Royaume-Uni à réagir, beaucoup plus que l’intérêt des consommateurs », analyse Joël Vormus, en charge du dossier à l’association CLER, spécialiste de la maîtrise de l’énergie et de l’efficacité énergétique.