Le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) hausse le ton concernant les volumes sonores à la télévision. Dès le 1er janvier prochain, les chaînes devront diffuser les spots publicitaires au même niveau que les programmes. Avant cela, dès le 19 décembre, elles auront adopté la même norme pour que le téléspectateur ne perçoive plus de différence en zappant d’une chaîne à l’autre.
Au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), les courriers de téléspectateurs se plaignant de différences de volume entre un programme et les publicités n’étonnent plus personne. « On en reçoit au moins deux ou trois par semaine depuis des années », confirme Christine Kelly, présidente du groupe de travail « Publicité et protection des consommateurs » au sein du Conseil. Cette pratique, les chaînes de télévision l’utilisent depuis longtemps pour servir les annonceurs, quitte à déranger les téléspectateurs. Les chaînes jouent le même jeu entre elles : le volume varie de l’une à l’autre dans l’espoir d’accrocher le public. C’en est bientôt fini. Le CSA a en effet adopté une délibération qui impose au secteur audiovisuel un arrêt de ces pratiques en trois dates.
– Dès le 19 décembre, la différence de volume entre les chaînes devra être supprimée. Techniquement, toutes devront diffuser leurs contenus à la même intensité sonore, fixée à -23 LUFS.
– Le 1er janvier 2012, les publicités devront être calées sur ce niveau, avec une marge de tolérance.
– Laquelle sera réduite au 1er janvier 2013, dernière étape du calendrier. La mesure s’applique à toutes les chaînes de télévision, quel que soit le mode de diffusion (TNT, fibre optique, ADSL, câble, satellite). Elle concerne aussi tous les programmes, qu’ils soient diffusés en direct ou pas, et même visionnés à la demande (en « replay ») depuis un téléviseur ou un ordinateur. En revanche, les contenus de la TV connectée, disponibles sur le téléviseur grâce à Internet (Youtube, Dailymotion, etc.), échappent au contrôle du CSA et ne sont donc pas concernés.
Déjà une obligation légale
Pour les autres, Michel Boyon, le président du Conseil, n’est pas inquiet. « Nous n’avons aucun doute sur la bonne volonté des chaînes à appliquer cette délibération, établie en concertation avec elles mais aussi avec tous les acteurs du secteur : éditeurs, producteurs, réalisateurs, annonceurs », explique-t-il. L’histoire permet pourtant de s’interroger. En effet, le volume sonore à la télévision a déjà fait l’objet de plusieurs normes et recommandations émanant de diverses organisations françaises et européennes (1). Le gouvernement s’en est inquiété en 1992, et le législateur l’a rappelé, en 2009 et 2010, par un décret et deux articles de loi (2). La loi impose de fait un volume sonore égal entre les programmes et les pubs, mais les chaînes la contournent par un tour de passe-passe technique (lire encadré). Cette fois, le CSA indique qu’il a mis en place des outils de contrôle. Et précise à qui veut l’entendre qu’il n’hésitera pas à sanctionner les récalcitrants.
La compression dynamique
Les chaînes de télévision affirment qu’elles diffusent bien les publicités et les programmes au même volume sonore, comme le préconise la loi. C’est vrai. Mais elles ne précisent pas que l’« intensité sonore » ressentie par les téléspectateurs n’est pas la même entre ces deux types de programme… Depuis le lancement de la TNT (télévision numérique terrestre) en 2005, les professionnels du son ont généralisé la technique de « compression dynamique » du son. Pour faire simple, on peut dire que celle-ci rend le son plus dense, ce qui a pour effet d’augmenter son niveau moyen. Le CSA précise qu’il dispose désormais d’outils de mesure fiables qui lui permettront d’exercer un contrôle, ce qui n’était pas le cas jusqu’ici.
Pour un même niveau de volume, le son est plus « fort » si le signal a subi une compression dynamique.
1. Une recommandation de l’Union européenne de radiotélévision, une norme de l’Union internationale des télécommunications, et enfin une recommandation française, établie par la Commission supérieure technique de l’image et du son, la Fédération des industries du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia et le HD Forum.
2. Le 21/07/2009. Modification de l’article 27 de la loi du 30/09/1986.
Le 02/07/2010. Modification de l’article 14 du décret no 92-280 du 27/03/1992.
Le 12/07/2010. Article 177 de la loi no 2010-788.
Camille Gruhier